Article publié le 16 septembre 2014 dans le magasine « L’Obs »
Essonne : des crèches privées au service des entreprises et collectivités
Massy (AFP) – Un monde miniature au pied des immeubles de grandes sociétés. Au cœur du quartier Atlantis à Massy (Essonne), une crèche, créée en 2011, accueille les enfants des salariés de deux entreprises voisines : Sagem et General Electric.
Face au besoin constant de places pour accueillir les jeunes enfants, de nouveaux acteurs combinent financements privés et publics pour construire des crèches au plus près des parents.
L’ancienne zone industrielle est en plein renouvellement et l’établissement pour bébés se retrouve cerné par le vacarme et la poussière des chantiers. Passé le sas de sécurité, le calme revient, seulement entrecoupé de quelques pleurs intermittents.
« On était précurseur quand en 2005, j’ai créé à Antony (Hauts de Seine) une crèche interentreprises sous forme associative », se souvient Evelyne Chevallier, fondatrice en 2009 de la « holding » Câlins Matins Crèches (CMC). Depuis, « le privé est venu renforcer l’action des pouvoirs publics », ajoute-t-elle.
Dans cette crèche de 45 places travaillent 16 personnes – uniquement des femmes : éducatrices et auxiliaires de puériculture, mais également une médecin, une chef de cuisine et une psychologue qui exerce dans les différentes crèches du groupe.
Pour créer un nouvel établissement, Evelyne Chevallier recherche à la fois des partenaires privés et publics. « Le financement de la Caisse des allocations familiales (Caf) peut atteindre 30% (…) On doit chercher le complément avec les banques privées », détaille-t-elle. Ensuite, les entreprises et collectivités partenaires assurent « 50% du budget d’exploitation », la moitié restante se partageant de manière égale entre la Caf et les parents.
En conséquence, la commune de Massy réserve plus de la moitié des places pour les habitants pas forcément salariés : « ça permet une mixité sociale et intellectuelle », estime la chef d’entreprise.
– « C’est la paix sociale » –
Selon elle, la crèche de Massy est « la plus jolie et la plus aboutie » des trois crèches gérées par le groupe, toutes en Essonne. Les enfants profitent d’un « ciel étoilé » de diodes lors de la sieste, d’une « salle sensorielle » et d’une autre dédiée à l’apprentissage de la marche. Ils bénéficient également de la proximité avec le lieu de travail des parents : « L’année dernière, une maman avait continué à allaiter », déclare Christine Têtu, directrice de l’établissement.
Sébastien Michon, jeune papa de 33 ans, travaille chez Sagem. En venant chercher sa fille de 2 ans, il se félicite qu’elle ne fréquente plus une crèche beaucoup plus grande à Nanterre : « c’était l’usine », tranche-t-il.
« Quand les parents entendent crèches privées, ils pensent qu’ils vont payer plus cher », regrette Evelyne Chevallier. Pourtant, l’établissement étant conventionné par la Caf, le tarif horaire s’échelonne « de 0,80 euro à 3,87 euros », selon la situation des parents.
D’après un rapport de la Caf en 2012, les entreprises de crèches représentent 5% des gestionnaires d’Etablissement d’accueil pour jeunes enfants (Eaje) mais sont porteuses de 26% des places créées.
Symbole de ce contexte, Câlins Matins Crèches devait ouvrir quatre nouveaux établissements dans le département avant fin 2015, portant son chiffre d’affaire à 4,3 millions d’euros. Une réussite qui repose tout de même sur la bonne volonté des entreprises partenaires.
« Lorsqu’il y a du mouvement au niveau des entreprises, le maintien de cet avantage social est toujours en suspens », explique Evelyne Chevallier. Pourtant, « c’est la paix sociale, l’assurance de salariés plus tranquilles », veut-elle croire.
« Le dynamisme des crèches privées lucratives est assez fort », reconnaît David Cassinari, collaborateur au conseil général de l’Essonne, qui délivre l’agrément indispensable à l’ouverture de tout nouvel établissement.
« C’est un secteur qui a besoin de beaucoup d’investissement et qui n’est pas saturé », déclare-t-il. Toutefois, « le financement public va aux crèches publiques » et le Conseil général ne subventionne pas ces acteurs privés.